Dossier Maurice Rollinat |
MAURICE ROLLINAT DANS LA PRESSE |
La Dépêche (Toulouse)
Dimanche 25 octobre 1903
Page 3.
(Voir le texte d’origine sur RetroNews)
ÇA ET LA
(…)
La Folie d’un Poète
Paris, 24 octobre. – Le Siècle annonce que le poète Rollinat vient d’être conduit à la maison de santé d’Ivry. La mort de sa femme lui a causé un tel chagrin qu’il est devenu fou.
Un ami de Rollinat, fin poète, lui aussi, M. Charles Freminé, a donné à un de nos confrères les renseignements suivants :
« Il y a quelque temps, sa femme est morte. Je l’appris, non par lui, mais par le frère de sa femme. Je lui adressai une lettre de consolation. Il ne me répondit pas. Alors, je m’informai et ce que j’appris est épouvantable…
» A Fresseline, dans la Creuse, où il habitait, Rollinat avait quatre chiens magnifiques. Une épidémie de rage sévit sur les chiens du pays. Mme Rollinat fit cacher ses chiens : « On dirait qu’ils sont enragés, dit-elle, et on me les tuerait. » Or, un matin, comme Mme Rollinat donnait à manger à ses chiens, l’un d’eux, un tout petit, noir, Topseck, se jeta sur elle, et la mordit à la main. Pendant quelques jours, Mme Rollinat ne dit rien de cette morsure ; puis, inquiète, elle vint à Paris, à l’Institut Pasteur ; il était trop tard. La malheureuse, dans des souffrances horribles, est morte enragée.
» Quand Rollinat apprit que sa femme était morte, il accourut. Il sut à quelle abominable maladie sa femme avait succombé, et, tout à coup, affolé, il s’écria : « Mais Topseck m’a léché, moi aussi ; moi aussi, je suis enragé !… » Et depuis, il se croit enragé ; mais de là à être fou, il y a loin.
» Je pense qu’il guérira. J’espère qu’il nous reviendra. »
Remarques de Régis Crosnier :
– 1 – L’article du journal Le Siècle évoqué au premier paragraphe est celui intitulé « Maurice Rollinat » paru dans l’édition du 24 octobre 1903, page 2.
– 2 – Ce n’est pas sa femme qui est décédée, mais sa compagne Cécile Pouettre.
– 3 – Le fait que Maurice Rollinat ait été conduit « à la maison de santé d’Ivry » sous-entend pour le journaliste que le poète « est devenu fou », ce qui est une conclusion hâtive qui se révélera fausse par la suite.
– 4 – La suite de l’article (du deuxième paragraphe à la fin) est extraite de l’article de Fernand Hauser, « Surmenage cérébral – La Folie d’un Poète », paru dans La Presse du 25 octobre 1903, pages 1 et 2.
– 5 – Au début du deuxième paragraphe, il faut lire « Charles Frémine » au lieu de « Charles Freminé ».
– 6 – Dans le quatrième paragraphe, « Fresseline » s’écrit avec un « s » à la fin ; le petit chien ne s’appelle pas « Topseck » mais « Thopsey ».
– 7 – Thopsey n’a pas mordu Cécile Pouettre à la main, mais au talon. Celle-ci n’est pas morte de la rage. Les analyses faites à l’Institut Pasteur ont montré que le petit chien qui l’avait mordue, n’était pas « enragé ». Entrée le 23 août 1903 dans une maison de santé située au 130, rue de la Glacière à Paris, Cécile Pouettre décède le 24 août 1903 (voir Émile Vinchon, La vie de Maurice Rollinat – Documents inédits, 1939, page 283). Les causes du décès ne sont pas connues mais sont peut-être liées au fait qu’elle prenait de la morphine pour ses douleurs.
|